C’est en bateau que les sœurs contemplatives débarquaient il y a un quart de siècle à Vilnius, capitale de la Lituanie. Ausra Cebatoritué, journaliste et proche des sœurs, nous partage quelques moments forts d’un jubilé fructueux.
« Je prie Dieu que vous soyez cette lampe qui éclaire tous ceux qui vous demandent une aide ou un accompagnement spirituel, qui viennent et trouvent en vous un abri ».C’est la prièredu cardinal AudrysJuozasBačkispendant la messe d’action de grâce pour la fondation des sœurs contemplatives de Saint-Jean en Lituanie le 3 juin dernier. C’est en effet à l’invitation de son Éminence, à l’époque Archevêque métropolite de Vilnius, que les premières sœurs arrivaient en Lituanie il y a 25 ans.
À l’époque soviétique, l’Église de Lituanie connaît une forme d’amenuisement : les persécutions des fidèles se multiplient et les entrées au séminaire restent limitées. L’Église catholique lituanienne ne se laisse pourtant pas ébranler : elle continue à parler haut et fort en Occident de sa situation, réfutant le mythe soviétique et son système prétendument humain. La liberté d’expression et la recherche de la vérité vont aller en grandissant, formant ainsi une résistance catholique qui va jouer un rôle prépondérant au sein de la résistance lituanienne. L’année1990,qui marque l’indépendance recouvrée et la fin de la sécularisation forcée, voit également s’ouvrir une période de renouveau spirituel : des congrégations monastiques sont fondées, d’autres sont rétablies.
C’est dans ce contexte, qu’en1992, les premières sœurs lituaniennes arrivent en France pour commencer leur noviciat chez les sœurs contemplatives à Saint-Jodard. S’ensuit, le 11 juillet 1998,la fondation des sœurs à Vilnius. Àla demande du cardinal Bačkis, les frères débutent leur ministère dès 1993 et seront un grand soutien avec l’aide des oblats et des amis du prieuré.
L’installation des Sœurs a connu une activité intense de fondationsur deux plans : déménagement, construction, restauration et rénovation des locaux, mais également organisation de la traduction, et publication de l’enseignement de la communauté à destination des laïcs, un double apostolat à plein temps ! Plus tard, avec le développement et le renforcement des groupes de laïcs et l’installation des sœurs apostoliques à Senieji Trakai, les sœurs ont pu revenir au rythme habituel de la vie contemplative.En 2013, au moment où la communauté Saint-Jean est frappée par la crise, elles quittent la Lituanie. Pourtant le couvent n’estpas fermé maisreste en veille durantquatre ans.
Avec le recul, la vie de la communauté en Lituanie fait penser aumouvement des vagues : des moments de calme et des moments inattendusou angoissants quiserrent le cœur. « Ce qui s’est passé ne doit pas nous paralyser et nous empêcher de vivre », souligne sœur DaivaMarija, supérieure du prieuré.
Ces années peuvent être vues comme un temps de purification et de renouvellement pournous rappeler que la mission majeure, malgré les vents contraires, reste la même :suivre le Christ, rester fidèle et demeurer en son amour. Elle ajoute : « Le Seigneur nous donne à vivre ce charisme. Avec la Vierge Marie, grâce aux femmes et aux jeunes filles qui viennent passer un temps au monastère, nous faisons l’expérience du mystère de la Compassion. L’apôtre Jean, le plus jeune et le plus aimé des disciples, m’aide à voir le foyer d’étudiantes de notre prieuré comme une opportunité pour partager avec ces jeunes filles ce que nous vivons ».
La gratitudea été le fil rouge de ce 3 juin dernier pour le jubilé. La plupart de nos invités ont contribué à la fondation ou à la pérennité du prieuré à un moment de son histoire, notre maison est bien ainsi celle de tous !
Une messe a ouvert la journée, à la fin de laquelle sœur Marie François, Prieure Générale des sœurs contemplatives, s’est exprimée : « Je vous remercie pour la confiance et la bienveillance que vous nous avez témoignées dès nos premiers jours dans votre diocèse. Il est évident que ce mot – ačiū[merci]– correspond le mieux à ce que nous célébrons ce jour-ci. Il conviendrait aujourd’hui de redireačiū365 fois, multipliées par 25 : un merci pour chaque jour depuis notre arrivée. ».
Après la bénédiction solennelle du Cardinal Bačkis, une agape s’est tenue dans le joli jardin des sœurs. Autre surprise : trois sœurs ont fait visiter les locaux du monastère: bibliothèque, cuisine, buanderie et une cellule ; sans oublier le foyer d’étudiantes et la maison où les sœurs accueillent des retraites. Puis une pièce montée de 8 kilos confectionnée à cette belle occasion a été servie ! La fête se termine, mais la gratitude n’aura jamais de fin. Dans un texte dédié à l’Année Sainte de la Miséricorde, le pape François a rappelé qu’un jubilé est une année entière où chaque moment est dit saint afin que notre existence devienne entièrement sainte. Puisse cette année d’anniversaire être remplie de tels moments et porter de nombreux fruits de sainteté !
Aušra CEBATORIUTĖ